Ruines de l'église des Célestins. Extrait de Douze vues de Vichy par Adrien de Bizemont, édité en 1847 d'après des dessins de 1822 conservés au Musée des Beaux-Arts d'Orléans. Si l’histoire de Vichy peut s’appuyer sur de nombreux documents de la période contemporaine, mais également sur les résultats des fouilles archéologiques pour les périodes antique et médiévale, les témoignages de son histoire sous l’Ancien Régime sont beaucoup plus exceptionnels. Aussi les bibliothécaires des fonds patrimoniaux se sont réjouies de l’entrée dans les collections municipales d’une rare relique du couvent des Célestins.
La description minutieuse d’un petit ouvrage du XVIe siècle dans le catalogue d’une vente aux enchères, organisée par la maison Osenat à Versailles en février dernier, a en effet permis de repérer un volume provenant de sa bibliothèque. Il s’agit d’un ouvrage de Jacques de Voragine (1228-1298). Dominicain devenu archevêque de Gênes, Jacques de Voragine doit surtout sa gloire littéraire à sa Légende dorée, recueil de vies de saints destiné à l'édification populaire, mais il a également laissé une chronique de la ville de Gênes et trois œuvres de pastorale, dont ce recueil de sermons.
Édité à Paris en 1533, il est imprimé, en latin, en caractères gothiques sur deux colonnes et contient trois planches gravées sur bois : une composition d’architecture en encadrement du titre, une nativité en pleine page et la marque typographique du libraire François Regnault illustrée d’un éléphant.
L’ouvrage, recouvert d’une reliure de veau ornée de filets, fleurons et armoiries, a gardé les marques de ses différents possesseurs. Ce sont deux mentions manuscrites portées sur la page de titre qui attestent son appartenance au couvent des Célestins de la Sainte-Trinité-lès-Vichy. La reliure porte quant à elle les armoiries et le chiffre de Louis-Urbain Le Fèvre de Caumartin, marquis de Saint-Ange (1653-1720) qui fut conseiller au Parlement de Paris en 1674, intendant des Finances en février 1690 et conseiller d'État en 1697. Enfin, un ex-libris armorié sur le premier contreplat (dos de la couverture), fait référence à son frère, Jean-François-Paul Le Fèvre de Caumartin (1668-1733), filleul du cardinal de Retz, qui reçut une abbaye à l'âge de sept ans, devint vicaire général de l'archevêque de Tours et fut par ailleurs garde des livres du Cabinet du roi et admis à l'Académie française.
Le couvent des Célestins avait été fondé par le duc Louis II de Bourbon en 1410. Après avoir subi plusieurs saccages lors des guerres de religion, il put être reconstruit grâce à de nombreux et généreux dons mais fut néanmoins supprimé en 1778, tomba bientôt en ruines et servit de carrière pour la construction des premiers hôtels vichyssois après la Révolution.
En 1679, Claude Fouet le décrivait dans son ouvrage « Nouveau sisteme des bains et eaux minerales de Vichy » comme « un très beau monastère des mieux situés de l’Europe », prévenant même le lecteur : « Ce superbe bâtiment est l’assemblage de tant de merveilles que nous craignons d’en diminuer la réputation… ». Un inventaire de 1771 (cité par Larroque, Les Célestins de Vichy, 1946) indique que « les bâtiments formaient un quadrilatère, dont un des côtés était occupé par l’église. Les autres côtés étaient composés d’un rez-de-chaussée et d’un étage. Au rez-de-chaussée se trouvaient, avec la salle capitulaire, les appartements des étrangers, la cuisine et ses dépendances, le réfectoire, une grande salle et le parloir ; à l’étage, les chambres des religieux et la bibliothèque qui possédait 1 200 volumes. »
Reste donc à retrouver la trace des 1 199 autres volumes de la bibliothèque des Célestins !
Ruines du Couvent des Célestins. Extrait de Douze vues de Vichy par Adrien de Bizemont, édité en 1847 d'après des dessins de 1822 conservés au Musée des Beaux-Arts d'Orléans.
Bibliographie :
Jacques de Voragine (1228?-1298). Sermones aurei et pucherrimi de tempore per totum anni circulum
François Larroque (abbé). Les célestins de Vichy
Adrien de Bizemont (1785-1855). Douze vues de Vichy et ses environs
Tous ces ouvrages sont consultables aux Fonds patrimoniaux.
L’ouvrage de Claude Fouet est consultable sur Gallica :