Une victime devenue bourreau
Le Démon de la Colline aux Loups – Dimitri Rouchon-Borie – Le Tripode - 2021
Le roman dépeint la vie de Duke, un homme incarcéré pour meurtre, qui utilise son temps en prison pour rédiger un journal retraçant son passé. Elevé par des parents monstrueux, marqué par la maltraitance et la violence dans sa maison sur la Colline aux Loups, il grandit dans un environnement brutal où la faim et les coups sont omniprésents. D’aussi loin qu’il se rappelle, son seul réconfort vient de ses frères et sœurs, la chaleur qu’ils dégageaient lorsqu’ils étaient tous blottis sous la même couverture, à même le carrelage de la pièce.
Découvrant le monde extérieur et apprenant son prénom sur les bancs de l’école, Duke paye un lourd tribut pour ses comportements inappropriés en société. Sorte d’enfant sauvage asocial, Duke va glisser au fil du récit du statut de victime d’abus à celui d’agresseur.
L'auteur nous décrit un homme sous l'emprise de son Démon. Le récit est un mélange de souvenirs douloureux, de quête de rédemption et de lutte intérieure contre les démons de son passé.
Rédigé dans un style puissant et brut avec l’emploi exclusif des points comme ponctuation, le texte témoigne de la candeur du héros. Et la violence crue et brutale qui se dégage de ce récit raconté sous le prisme de l’enfant ne peut laisser indemne.
Pour reproduire avec autant de justesse la voix brisée d'une victime devenue bourreau, il faut probablement, comme l’a fait Dimitri Rouchon-Borie, avoir passé beaucoup de temps dans les tribunaux.
Mireille
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Entretien avec l'auteur ici
Extrait
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« Celui qui était debout a dit que je devrais sans doute venir à la brigade et répéter des choses et que je ne devrais pas m’inquiéter de ce qui allait se passer mais qu’ils devraient me protéger du père et de la mère et qu’ils payeraient pour ça j’ai dit qu’ils étaient trop pauvres.
Après j’ai été gâté et plein de gens venaient me poser des questions et j’ai rencontré un médecin qui opère les enfants et il m’a dit alors le héros comment il se porte le héros et je n’osais pas lui dire que mes pouvoirs c’était à cause du Démon qui m’avait sauvé mais qui m’avait aussi condamné pour toujours.
Au bout d’un moment j’ai craqué et j’ai pleuré et pleuré encore et je n’arrêtais plus de pleurer et les infirmières me prenaient dans leurs bras et une a pleuré aussi et je me disais c’est étonnant qu’il y ait tant de femmes gentilles et que pas une n’a pu être ma mère. La maîtresse est venue me voir et elle a apporté des sucettes et c’était de la part du docteur qui écoute dans le dos. »